Thursday, March 10, 2016

مقال في اللوريان - لوجور بقلم الصحافية سارليت حداد

Scarlett HADDAD مقال لسكارلت حداد في اللوريان -لوحور
Deux lectures de l’attitude saoudienne à l’égard du Liban
Scarlett HADDAD مقال لسكارلت حداد في اللوريان -لوحور
La petite phrase du ministre de l'Environnement Mohammad Machnouk, lundi, après sa rencontre avec le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir à Djakarta, a suscité des réactions contradictoires dans les milieux politiques libanais. Machnouk avait en effet annoncé aux Libanais qu'il n'y aurait pas de nouvelles mesures saoudiennes à l'égard du Liban et que la tension dans les relations entre les deux pays faisait désormais partie du passé. Les milieux proches du courant du Futur ont aussitôt estimé que Machnouk s'est voulu rassurant, mais la réalité est bien différente. Preuve en est le refus des Émirats d'accueillir une délégation libanaise du ministère de la Jeunesse et des Sports ainsi que les nouvelles dispositions prises par la compagnie officielle d'aviation des Émirats, Etihad, à l'Aéroport de Beyrouth. Ces mêmes milieux reprennent l'annonce faite par le ministre de l'Intérieur Nouhad Machnouk il y a deux semaines lorsqu'il a déclaré que « le pire est encore à venir » et précisent que les décisions saoudiennes à l'égard du Liban vont aller crescendo et qu'aucun apaisement n'est en vue, contrairement aux affirmations du ministre de l'Environnement.
Par contre, certaines parties libanaises ont une autre lecture. L'ancien vice-président de la Chambre Élie Ferzli considère ainsi que les mesures saoudiennes contre le Liban ont une double dimension. La première est régionale et s'inscrit dans le cadre de la lutte d'influence qui oppose le royaume saoudien à l'Iran, dans le monde arabe. Sur ce plan, les dirigeants saoudiens sont déterminés à poursuivre l'affrontement, au Liban et dans les autres scènes arabes, et la tension n'est donc pas appelée à baisser. Mais il faut toutefois faire une distinction entre cette détermination saoudienne à contrecarrer l'influence de l'Iran dans la région et les décisions prises à l'encontre du Liban qui, elles, seraient inspirées par des parties libanaises elles-mêmes. Ferzli est ainsi convaincu que, dans ce domaine, les Libanais vont souvent plus loin que les Saoudiens, et ce serait donc des parties libanaises qui auraient conçu le plan d'adopter des mesures contre les Libanais pour encercler le Hezbollah et le pousser à cesser d'appuyer le général Michel Aoun à la présidence.
Le plan serait simple : ce qui entrave actuellement l'élection d'un président, c'est l'alliance entre Michel Aoun et le Hezbollah et le fait que « le général » est déterminé à maintenir sa candidature à la présidence. Il faudrait donc trouver une formule de rechange pour pousser le Hezbollah à renoncer à appuyer cette candidature en exerçant suffisamment de pressions sur lui pour le pousser à changer d'avis. Et cela ne peut se faire qu'à travers l'adoption de mesures qui touchent son environnement populaire chiite, ainsi que les Libanais en général. C'est dans ce contexte que l'idée de soutenir la candidature de Sleiman Frangié à la présidence aurait germé dans certains esprits libanais qui ont estimé qu'il s'agit d'une proposition qui ne peut que séduire le Hezbollah, et s'il est coincé par des mesures drastiques économiques et politiques, il pourrait finalement lâcher la candidature du général Aoun. À ce moment-là, il sera toujours temps de négocier la candidature de Frangié, ou éventuellement une troisième possibilité.
Les déclarations qui ont suivi l'annonce du gel du don de trois milliards de dollars en équipements français à l'armée libanaise seraient donc à mettre dans ce contexte. Les Saoudiens ne voulaient peut-être pas aller plus loin, mais certains Libanais auraient poussé vers plus d'escalade. D'ailleurs, pour l'ancien vice-président de la Chambre, il n'y a aucune différence importante entre la position du ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil à la réunion du Caire et celle du ministre de l'Intérieur Nouhad Machnouk à la réunion de Tunis. Pourtant, le ministre Bassil a été victime d'une véritable cabale alors que le ministre de l'Intérieur a été salué comme un héros. La seule différence serait donc dans le timing. L'abstention du Liban au sujet de la mise du Hezbollah sur la liste arabe des organisations terroristes aurait pu être utilisée dans le cadre d'une négociation avec ce parti pour le pousser à renoncer à la candidature du général Aoun. Mais en adoptant si naturellement cette position, le ministre Bassil aurait donc privé certaines parties libanaises d'une carte de pression et de négociation.
En donnant sa couverture à la position de Bassil, le Premier ministre Tammam Salam n'était évidemment pas au courant des manœuvres de certaines parties appartenant à son propre camp politique, n'ayant qu'un souci : préserver la cohésion de son gouvernement à une période aussi délicate de la vie de ce pays. Mise dans ce contexte, la déclaration du ministre saoudien des Affaires étrangères au ministre Mohammad Machnouk portant sur le fait qu'il n'y aura pas de nouvelles mesures de rétorsion contre les Libanais dans le Golfe devient logique. Pour Ferzli, dès le départ, les dirigeants saoudiens n'auraient pas été si loin si des Libanais n'étaient pas intervenus auprès d'eux pour qu'ils le fassent. Les Saoudiens savent que les Américains ne veulent pas que la scène libanaise plonge dans le chaos. Ils savent aussi que le rapport de force actuel au Liban est en faveur du Hezbollah. Par conséquent, toute tentative de déstabilisation viserait à renforcer l'emprise de ce parti sur le pays et à affaiblir leurs alliés. Dans une sorte de confirmation indirecte de cette version, la délégation parlementaire qui s'est rendue récemment à Washington est revenue avec l'impression que l'administration américaine ne souhaite pas ébranler le secteur bancaire libanais, sachant que cela pourrait entraîner une déstabilisation du pays. Si ces éléments sont mis bout à bout, une conclusion s'impose : des parties libanaises utiliseraient leurs relations régionales et internationales pour obtenir des acquis dans les négociations internes...

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